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  • : Le blog de Elli Dryade
  • : Un blog dédié aux histoires que j'écris. Il y aura surtout du merveilleux et du fantastique!
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3 février 2010 3 03 /02 /février /2010 15:52
Invocations


Acte I        O Ascalon!

Scène 1           Les fondations sont jetées


       L'empereur se pencha pour la centième fois sur le rapport posé devant lui. Et pour la centième fois, il releva la tête en soupirant :  "Cela s'annonce difficile..." Et pour la centième fois, l'homme posté devant l'écritoire acquiesça.
     "Si je puis me permettre, Votre Majesté, personne n'a prétendu que cela serait aisé, ajouta-t-il.
- Je le sais bien, Charibert. Mon père lui-même, -que sa mémoire soit honorée dans les siècles! - n'y est pas parvenu.
- Votre vénéré père a dû faire face à des difficultés que vous avez la chance de ne pas connaître, objecta Charibert. Votre élection fut des plus aisées, et vous n'eûtes presque pas d'opposants."

        L'empereur Liudolf regarda rêveusement une carte fixée au mur. Elle représentait l'Empire du Couchant dans toute sa splendeur ; grand, riche et prospère, oui... mais si difficile à conquérir et à garder!
         L'Empire est divisé en une infinité de territoires de tailles variables. Les plus grands, et sans conteste les plus puissants, sont les Trois Royaumes d'Arnit, du Sud et du Levant. A la mort de l'empereur, ce sont les trois dirigeants de ces royaumes qui élisent le successeur; ils ont donc un poids politique considérable dans l'Empire. Les duchés, comtés et villes libres d'Empire ne sont cependant pas à négliger pour autant; on peut dénombrer vingt-trois duchés indépendants, autant de comtés et une soixantaine de villes libres. Les villes en particuliers se réunissent au sein de ligues très puissantes qui peuvent devenir redoutables si elles ne sont pas contrôlées.
           L'empereur lui-même ne possède pas de terres. Il peut s'appuyer sur celles de sa famille, mais en aucun cas ne peut y intervenir en tant qu'empereur. La famille de l'empereur Liudolf a confisqué les élections depuis des générations, et même si la dignité impériale n'est pas héréditaire, le fils succède souvent au père. Cela n'empêche aucunement les Grands de l'Empire de se rebeller à chaque succession et de chercher à secouer le joug impérial. Chaque empereur eut des révoltes à mater dès son accession au trône: Luitpold, le père de l'empereur Liudolf, a consacré cinq ans à asseoir son pouvoir sur la noblesse d'Empire.
         Liudolf lui-même n'eut pas à guerroyer pour faire valoir ses droits après l'élection. Seules les Marches de l'Est, nouvellement conquises, refusèrent un temps de reconnaître l'empereur et de lui verser le tribut. Mais il ne fut pas difficile de les ramener à la raison, et un an seulement après son élection, l'empereur Liudolf régnait sur un empire pacifié. C'est pourquoi il avait décidé d'entreprendre la réalisation d'un projet depuis longtemps édifié : fonder une capitale impériale, une ville libre d'Empire qui appartiendrait à l'Empereur.

      La porte s'ouvrit en grand, arrachant l'empereur à ses pensées; un petit homme aux cheveux gris entra en tourbillon dans la pièce.
"Votre Majesté, je les ai!
- Vous avez... quoi, exactement, Herland? s'enquit plaisamment Sa Majesté. La dernière fois que nous nous sommes entretenus, nous parlions de tartes aux fruits. Or, ce n'est pas exactement ce que j'aperçois dans vos mains...
- Ce sont les accords des Corps de Métiers, dit le vieil homme, rouge de satisfaction. Je les ai tous eus !
- Même les Hauts Ordres?  s'étonna Charibert, qui reposa sa plume dans l'encrier et s'approcha. Vous êtes étonnant, Maître Herland.
- Jeune homme, vous parlez à celui qui a refondu les vénérables  statuts des Corps de Métiers, dit Herland en bombant le torse. Ils n'ont pas pu me battre sur le terrain juridique,  ah çà non. Ils participeront tous, c'est Herland qui vous le dit!
- Que ferais-je sans vous? dit l'empereur en regardant avec affection le petit homme.
- Attendez, vous n'avez pas tout vu. Je me suis arraché les rares cheveux qui me restent, mais j'ai réussi... (Herland déroula quelques parchemins)... hem... ah çà! Où sont-ils passés? Ah! voilà. C'est une ébauche de loi pour les statuts de la Milice Impériale."

           Charibert s'empara des parchemins et commença à lire. Herland exultait:
"Jamais je n'aurais cru voir un jour Ascalon sortir de ses vieux parchemins, Sire!, ah çà non! Je prie le Très-Haut de me laisser vivre assez longtemps pour voir enfin apparaître la ville impériale, blanche comme les cités légendaires...
- Vous êtes poétique, ce soir, dit Liudolf.
- J'en ai tellement rêvé! soupira le vieil homme. Bien, pour en revenir à nos problèmes... Les Hauts Ordres n'acceptent d'envoyer qu'un seul de leurs membres.
- Un seul? Mais nous avions demandé au moins dix hommes par corps...
- J'imagine que c'est pour pouvoir plus facilement le récuser en cas de conflits avec vous. Ils sont passés maîtres dans ces combines, ah çà oui."

               Les métiers dans l'Empire étaient organisés en Corps de Métiers. Il  y en avait de toutes sortes; les plus importants étaient les corps guerriers,-Epéistes, Archers, Sabreurs et Techniciens issus de la très prestigieuse Académie Artes Bellarum-, les Guérisseurs et les Sages du Musaion. Tous ces corps pratiquaient peu ou prou la magie sous certaines formes; mais la plus haute autorité en matière de magie était le Corps des magiciens, plus connu sous le nom de "Hauts Ordres". Ces derniers, en riason de leurs immenses pouvoirs, avaient une Charte très particulière et très complexe qui leur évitait de se mêler des affaires du monde, sauf en cas d'extrême urgence. Et même alors, la procédure était longue et minutieusement respectée.
            En leur demandant de participer à la formation d'une Milice Impériale avec les autres corps  précédemment cités, l'empereur s'attendait à un refus catégorique et se préparait à engager une bataille juridique; pour l'unité de l'Empire, il était impératif que les Corps les plus importants soient impliqués dans la naissance d'Ascalon. Que les hauts Ordres acceptent sans broncher d'envoyer quelqu'un pour la Milice laissait Liudolf assez perplexe. Les Hauts Maîtres étaient trop intelligents pour envoyer un petit Magicien; mais également trop pour envoyer un de leur meilleurs éléments... surtout s'ils voulaient pouvoir le récuser, comme Herland l'avait supposé. Or, Liudolf faisait entièrement confiance au flair du vieux juriste...

           "O Ascalon! Tu n'es pas encore née, mais combien de soucis m'as-tu déjà donnés! soupira l'empereur. Mais qu'importe! Désormais tes fondations sont jetées, et bientôt tu vivras!"







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